Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
le zinc de l'écriture
18 décembre 2012

une de perdue…

« Une de perdue …et toujours la meilleure » s’exclama t-il, en essayant de retenir la phrase qui s’était envolée de sa page. Il la vit dériver lentement puis prendre son essor et se diriger résolument vers des rivages inconnus. Ce n’était pas la première fois qu’il constatait cet étrange phénomène : les phrases jaillissaient puis, ivres de liberté, elles disparaissaient de son champ de vision. Il tentait de les capter mais trébuchait et restait bouche bée devant le vide. Un jour, c’est un adjectif qui se fit la malle et le nom resta interdit, perplexe devant sa pauvreté nue : « sans qualificatif, je ne suis qu’un pauvre hère, vague et indéfini » constata-t-il désemparé. Puis, quelques jours plus tard, le dernier mot qui lui restait en travers de la gorge, se coinça dans les parois étroites de son œsophage et l’écrivain éperdu lança son dernier cri. 

Mais « pluie du matin n’arrête pas le pèlerin » : l’eau ruisselait sur son visage, pénétra dans sa bouche tordue par le cri du désespoir, libéra le mot prisonnier du corps étriqué. L’écrivain en hoquetant, recracha le mot puis l’adjectif revint se poser à côté de son compagnon familier, la phrase, enfin, revint à son tour sur la page et se déploya dans toute sa majesté. L’écrivain retrouvant son foisonnement verbal ne put que constater sa victoire sur la page blanche et triomphant, il s’exclama : « Une de perdue… dix de retrouvées » !

 

Sylvie M.

Publicité
Publicité
Commentaires
le zinc de l'écriture
Publicité
Publicité